Julien I Chapters 13-14
Chapitre 13
Eng'Hornath
L'inimaginable venait de se produire. Le piège si minutieusement préparé venait à nouveau de laisser échapper sa proie. Au cœur du Désert Ultime, le Cercle d'invocation disparut dans un claquement assourdissant d'électricité statique. Les dix-sept Sorciers d'Eng'Hornath demeurèrent un long moment figés. Le sang de la victime s'égouttait encore de la Pierre de Pouvoir dont personne n'osait prononcer le nom. Les grandes ailes aux plumes bleues et dorées du vril avaient depuis longtemps cessé de frémir, mais l'oiseau rarissime et sacré de Tandil avait tardé encore à mourir. Sa souffrance avait nourri la magie impie et terrible des mages proscrits. Sa beauté saccagée était le signe de leur allégeance aux démons chaotiques de l'En-Dehors. Il n'en fallait pas moins pour maîtriser une telle quantité de ghorrs. Et pourtant, cela n'avait pas suffi.
Demd'Rhat s'écroula. Dans la lumière blafarde de la seconde lune, le sang qui jaillissait de sa bouche et de ses oreilles paraissait noir. Demd'Rhat mourait, le choc en retour venait de le frapper. La Magie Ténébreuse ne tolérait aucun déséquilibre : lorsqu'on frappait pour tuer, quelqu'un devait mourir, et si l'on manquait la cible, c'était l'invocateur qui perdait la vie. C'était le second depuis que les Sorciers d'Eng'Hornath s'étaient réunis pour accomplir leur œuvre de mort.
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Chapitre 14
Découvertes
Le clos en question était en fait l'équivalent d'une vaste suite dans un palace de la Riviera. Julien les attendait, assis sur l'un des sièges confortables qui entouraient une table basse, couverte de ce qui devait être un en-cas prévu pour lester leurs estomacs affamés avant d'aller au lit. Après tout, ils avaient sauté le repas du soir. Mais la tête d'Ambar à la vue de cet amoncellement de merveilles odorantes valait à elle seule le déplacement. Il y avait sans doute là plus de friandises inconnues que de nourritures qu'il aurait pu nommer.
“Il était temps que vous arriviez, lança Julien, j'allais manger la part d'Ambar.”
Ce dernier, incertain de ce qu'on attendait de lui, hésitait à s'approcher et il fallut que Niil le pousse d'une main ferme vers un fauteuil ou il le fit asseoir d'autorité.
“Ambar, expliqua-t-il, il va falloir que tu t'habitues. À partir d'aujourd'hui, tu fais partie de ma Maison. Tu n'es plus un mendiant et tu n'es pas non plus un serviteur. Je sais bien que tu ne connais rien à la vie dans une Noble Maison, mais personne ne te grondera si tu commets des erreurs. Mange tout ce que tu voudras et ne t'occupe pas du reste.”
“Mais, Noble Sire, je suis tout sale, je vais en mettre partout !”
“De toute façon, tu vas te couvrir de sauce. Il vaut mieux attendre d'avoir fini de manger pour prendre un bain.”
Et, sans doute pour briser les dernières résistances de l'enfant, il se saisit d'un beignet et l'engloutit en deux énormes bouchées, sans se préoccuper de la graisse qui ruisselait sur son menton et ses vêtements. Julien, qui l'avait vu chipoter avec distinction à la table d'Izkya, s'abstint de tout commentaire.
“Et comment vas-tu Julien ? Je n'ai pas très bien compris ce qui t'est arrivé, tu étais complètement collé au Passeur. Comment vont tes côtes ?”
“Mes côtes vont bien,merci. Les médecins m'ont fait boire quelque chose contre la douleur. Je ne sens presque plus rien. Ils m'ont dit aussi qu'elles n'étaient pas cassées, mais fêlés et que j'avais beaucoup de chance parce que comme ça, il n'y a pas de danger que mon poumon soit perforé. Ça guérira tout seul, mais il ne faut pas que je fasse trop d'efforts. Moi, ça me va. Tant que ça ne fait pas mal... et toi, comment vas-tu ?”
“Oh moi, je n'ai rien fait. J'ai presque honte. Tu te rends compte ! Tout le monde se battait et moi, je n'avais même pas un couteau.”
“Ça n'était pas ta faute. Et puis, de toute façon, ça n'a pas duré très longtemps.”
Il aurait bien ajouté que, face à la furie qu'ils avaient affrontée, Niil n'aurait pas pesé grand chose, mais c'eût été manquer de tact.”
“Mais dis donc, demanda Niil, pourquoi est-ce que tu étais agrippé comme ça au Passeur ?”
“Je ne sais pas trop. J'étais terrifié. On a été bousculés, et je pense que je me suis raccroché à ce que j'ai pu. Je ne me souviens plus très bien, tu sais.”
Julien se souvenait très bien, trop bien même, de sa terrifiante expérience de fusion avec Aïn, bien qu'il n'ait aucune idée de ce qui lui était vraiment arrivé. Mais il n'avait, pour le moment, pas la moindre envie de s'étendre sur le sujet.
Aussi s'employa-t-il avec l'aide de Niil, à faire parler Ambar entre deux bouchées de choses délectables. Et bientôt, ce dernier, totalement détendu, entreprit de leur conter son odyssée, avec un luxe de détails qui ne manqua pas de plonger Julien dans des abîmes de perplexité. Le seul fait qu'un gamin de dix ans évoque sans broncher la possibilité pour ses pareils de faire commerce de leurs charmes avait déjà de quoi le choquer profondément. Mais la scène de la douche, et la féroce jubilation avec laquelle le cher ange décrivait la mise hors de combat d'un ennemi trop sûr de lui, ouvrait des perspectives glaçantes sur la façon dont on envisageait ici la lutte légitime pour sa survie. Malgré toute l'aversion qu'il avait pour ce type qui se réjouissait de violer un gamin, il ne put se retenir de frémir à la pensée du traitement qu'il avait subi.
“Il n'a même pas eu le temps de crier. Il a seulement aspiré un grand coup, et puis sa tête a cogné contre le mur et il est devenu tout mou. De toute façon, moi, je ne lui avais rien demandé. Je ne lui avais pas fait signe. Il n'avait pas le droit de me forcer, hein ?”
Niil le rassura :
“Bien sûr qu'il n'avait pas le droit. Tu as eu parfaitement raison. Tu aurais eu raison, même si tu n'avais pas eu une mission à remplir. J'espère que ses couilles vont lui faire mal un bon bout de temps.”
“Moi, j'espère surtout que je ne le reverrai jamais. Parce que s'il me reconnaît, il risque de vouloir se venger”.
L'idée de la vengeance possible d'un guerrier d'Yrcadia jeta un froid que Niil s'empressa de dissiper :
“Tu n'as pas à t'inquiéter de ça. Tu es sous la protection des Ksantiris, maintenant.”
Mais bientôt la fatigue finit par prendre le pas sur l'excitation. Après tout, Ambar n'avait pas dormi longtemps dans les quartiers des Gardiens. Aussi, c'est dans un état semi-somnambulique qu'il se laissa guider par Niil vers une salle d'eau digne de Cléopâtre. Il eut bien une vague protestation :
“Noble sire, ne vous donnez pas cette peine. Je peux me débrouiller seul.”
Mais Niil ne voulut rien entendre :
“Tu ne tiens pas debout. Je suis sûr que tu te noierais dans le bassin. Et puis, je t'ai déjà répété au moins cent fois de ne pas m'appeler Noble Sire. Julien, tu viens m'aider ?”
Julien n'était pas sûr de vouloir participer à l'opération. L'idée d'une douche tiède suivie d'un bain parfumé en compagnie des deux garçons avait bien des attraits. D'un autre côté, la seule vue de Niil dépouillant Ambar de son abba provoquait une réaction qu'il aurait préféré cacher. Quoique Niil, maintenant tout nu, soit manifestement tout aussi sensible au spectacle du gamin bronzé.
De deux choses l'une, se dit Julien, ou bien Niil était un être obsédé, pervers et vicieux au dernier degré, ou bien c'était une des aimables coutumes du pays que de se savonner entre garçons. Et peut-être bien aussi, pour ce qu'il en savait, entre garçons et – quelle horreur! - filles.
En tout cas, ce n'était pas la coutume à Paris. Et même si, n'ayant pas suivi le catéchisme, il n'avait été que modérément exposé aux fulminations cléricales contre les ''mauvaises habitudes'' et les ''mauvaises pensées'', une opinion non exprimée, mais toute puissante et universellement partagée, voulait que tout ce qui pouvait causer peu ou prou une excitation sexuelle fût hautement coupable, sinon carrément peccamineux. Il s'en fallait de beaucoup que les slogans révolutionnaires de la Sorbonne aient fait leur chemin dans la majorité des esprits ! Déjà, pour Julien, les ébats de ce matin eussent été absolument inconcevables dans le monde normal et, s'il avait ressenti un certain agacement d'être littéralement interrompu par le gong, il avait aussi été secrètement soulagé de n'avoir pu aller jusqu'à leur conclusion logique. En d'autres termes, il n'aurait pas fallut que Niil insiste beaucoup pour qu'ils en viennent à se caresser ( bon, à se br..., à se branler. Il ne connaissait vraiment pas d'autre mot pour kouwa djinnpa tang wa), mais il savait aussi l'épouvantable honte qui aurait suivi la fulgurante extase. Il la connaissait bien, pour l'éprouver, comme un châtiment divin, à chaque fois qu'il se laissait aller à ce plaisir coupable, c'est à dire, en dépit de cette torture, de plus en plus fréquemment depuis qu'il avait découvert cet usage abject, indigne et répréhensible de son corps.
Par ailleurs... Il ne voulait pas faire injure à son hôte, n'est-ce pas ?
À Rome, fais comme les Romains, comme on dit.
Il se leva donc, se dépouilla de ses vêtements et, sans même chercher à dissimuler sa honteuse turgescence, s'en fut rejoindre, par pur sens du devoir, Niil et son pupille.
Il constata bientôt qu'il s'était complètement mépris sur les raisons de la réticence initiale du gamin. Ce n'était pas le fait de dévoiler son intimité qui le gênait, mais celui de voir un Noble Sire mis dans la position d'être, en quelque sorte, son serviteur. Car pour le reste, une fois qu'il eût admis que Niil ne changerait pas d'avis, il s'abandonna avec un évident plaisir aux bons soins de son Bienfaiteur.
Quant à Julien, après avoir lutté contre ses penchants luxurieux pendant trois respirations ( enfin... deux et-demie... disons... un instant. Pas trop long... ), il saisit ce qui ressemblait à une éponge et, pénétrant sous la pluie tiède qui tombait du plafond de la douche, il entreprit de faire ce qu'on lui demandait : savonner Ambar.
Réflexion faite, il abandonna très vite l'éponge, accessoire inutile, certainement inventé par des pisse-froid moralisateurs. L'efficacité, la précision, indispensables à une hygiène vraiment irréprochable exigeaient, qu'on n'utilise, pour explorer, oindre, savonner, frotter si nécessaire chaque coin et recoin du sujet, que ses main nues ( NUES ! ) sur la peau nue ( NUE ! ). Les doigts, en effet, ont à leur extrémité des petits coussins que la nature semble avoir prévus tout exprès
Ce n'était que la seconde fois de toute sa courte existence qu'il avait l'occasion d'explorer ainsi un autre corps que le sien et il trouvait la chose agréable au possible. Mais “après un choc initial “il franchit un pas supplémentaire dans le ravissement lorsqu'Ambar, en toute candeur et gloussant sous les chatouilles de Niil, se saisit de la main de l'étranger pour la poser et la refermer sur cette petite queue toute raide qu'il n'avait fait jusqu'à présent qu'effleurer du dos de la main au hasard du chahut. L'objet en soi n'était pas bien grand, six ou sept centimètres, peut-être, et gros comme un de ses doigts, mais sa seule consistance, mélange d'incroyable rigidité et de douceur l'emplit d'un bonheur étrange, d'une tendresse telle qu'il sentait quelque chose fondre dans sa poitrine. Il était à genoux, et c'était tant mieux car ses jambes l'auraient certainement trahi.
Sa conscience, anesthésiée par ce déluge de sensations, n'eut pas un frémissement lorsque, non content d'éprouver du plaisir à tenir ce membre qu'on dit honteux il entreprit, en quelque sorte, de faire plus ample connaissance, histoire d'occuper ses loisirs alors que son compagnon s'employait à récurer l'autre côté du sujet qui pourtant avait déjà fait l'objet, Julien s'en souvenait, d'un récurage en règle. Il put ainsi constater de tactu que le charmant capuchon de peau souple découvrait, pour peu qu'on le rétractât avec délicatesse, une tête ronde et fendue, cerise brillante, d'un rose foncé, tout à fait pareille à celle qui ouvrait un œil au bas de son propre ventre. À la taille près, bien sûr (quand même !). Le sac ridé ornant la base du tube qui palpitait doucement dans sa main, révélait sous les doigts deux haricots étonnamment familiers et probablement tout aussi sensibles.
Il se serait volontiers perdu dans cette contemplation si l'enfant, saisissant de nouveau sa main et la faisant aller et venir, ne lui avait signifié, sans équivoque possible, qu'il était temps de mener les choses à leur terme pour lui permettre de finir sa nuit interrompue.
Seul un cœur d'airain eût refusé de secourir cet enfant dans la détresse. Julien n'avait pas un cœur d'airain. Assis en tailleur, le nez à quelques centimètres de son sujet, il s'exécuta de son mieux, aidé dans cette tâche charitable par un Niil très occupé lui-même à prodiguer du bout des doigts d'intrigantes attentions à des régions que Julien, jusque là, n'avait jamais soupçonnées de pouvoir générer un quelconque plaisir. Il se trompait sans doute, s'il fallait en juger pas les contorsions étonnantes d'Ambar ainsi sollicité à la fois sur l'avers et le revers.
Menée avec une telle intensité, l'opération ne pouvait durer très longtemps mais elle se conclut cependant à la plus grande satisfaction d'Ambar qui émit une sorte de couinement de souris alors que tout son corps semblait tétanisé. Le souffle court, il se laissa aller dans les bras de Niil avant d'émettre un : ''Merci. Merci beaucoup.'' qui faisait honneur à son éducation.
Il s'endormit alors qu'on le séchait. Niil le porta, tout mou et comme irradiant une bienheureuse satiété, dans la vaste chambre à coucher où il le déposa sur l'un des trois lits préparés pour eux. Après l'avoir recouvert d'un drap léger, il retourna vers Julien.
“Je crois qu'on peut en faire autant. On aura tout le temps demain pour se tremper dans le bassin.”
Le coup était rude. Après une telle entrée en matière, il allait avoir du mal à trouver le sommeil. Évidemment, on pouvait aussi considérer qu'il évitait ainsi de sombrer dans une totale dépravation...
“Si ça ne t'ennuie pas trop, continua Niil, on pourrait partager un lit. Tu veux bien ?”
Dépravation ? Quelle dépravation ? Non il n'y avait là qu'un garçon, éprouvé par le sort et les dangers, qui cherchait auprès d'un camarade le réconfort d'une épaule accueillante. Seul un cœur d'airain...
“Bien sûr ! Moi non plus je n'ai pas trop envie de dormir tout seul.”
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Dormir, rêver peut-être ?... Oui, mais pas tout se suite.
À la lueur de la seule petite veilleuse que Niil avait laissée allumée, ils s'étendirent sur une couche si large qu'on eût pu la soupçonner d'être destinée soit à des hôtes carrément gigantesques, soit à des ébats franchement... pluriels. Sans la moindre hésitation, Julien s'installa dans les bras accueillants de l'étrange garçon qu'il commençait à considérer sérieusement comme l'ami, ou le frère, qu'il n'avait jamais eu. Mais on n'était plus là dans une salle de bain. L'heure n'était plus au chahut. Et ce qui advint entre eux parut à Julien si simple, si naturel qu'il se laissa glisser dans cette douceur sans la moindre arrière pensée.
Les caresses de Niil, tout empreintes d'une tendresse qu'il ne cherchait nullement à déguiser, venaient peu à peu à bout des contraintes imposées par l'hypocrisie d'une éducation puritaine qui méprisait non seulement les corps, mais aussi toute douceur et selon laquelle les garçons ne se touchaient que pour se donner des coups qui, bien sûr, ne les faisaient jamais pleurer.
Ici, à l'évidence, cette règle n'avait plus cours. Les garçons se touchaient, et c'était infiniment agréable. Maintenant qu'ils n'étaient plus sous le ruissellement continu de la douche, Julien put éprouver pour la première fois combien la peau de Niil était douce. Il sentait sous sa main les reins qui se creusaient, la courbe parfaite, à la fois fraîche et tiède des fesses.
Il se livrait sans retenue aux explorations de son ami, suivant avec bonheur la promenade voluptueuse de ses doigts qui semblaient savoir exactement où, et de quelle façon, il fallait caresser.
Il s'efforçait, en élève doué, de reproduire les agaceries délicieuses auxquelles il était soumis.
Il explorait avec avidité ce sexe qui s'offrait, si semblable au sien, si totalement autre.
Et, lorsque Niil enserra leurs deux verges dans une étreinte ferme, il n'eut pas une hésitation, joignant les sacs délicats de leurs bourses pour une intimité plus grande encore.
Il était difficile de maintenir cet assemblage instable, qui tendait à leur échapper à tout moment. Il leur fallait se limiter à des mouvements de peu d'ampleur, leurs pénis de plus en plus lubrifiés se frottant sur toute leur longueur, leur glands découverts unis en un baiser glissant, leurs testicules encore immatures pressés ensemble au creux des mains de Julien.
Ensemble, trop tôt, ils furent emportés au-delà de ce point où l'on ne peut plus rien arrêter.
Ensemble, secoués par les décharges répétées d'un plaisir d'autant plus violent qu'il était encore sec, ils firent le saut déchirant de l'extase.
Et l'épuisement les rattrapa enfin et, en quelques respirations, avant même qu'ils aient pu esquisser un geste pour démêler leurs membres enlacés, ils furent submergés par les eaux profondes et légères d'un sommeil sans rêve.
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