La Muse Chapter 8
LA MUSE
Chapitre 8
Par David Inutookaminoma
Au petit matin du lendemain, Meike s’échappa sans un bruit de la chambre de son magnifique partenaire à la peau si soyeuse qu’il observa quelques secondes depuis la porte. Soan, endormi sur le dos, une main paisiblement posée sur le bas-ventre, nu comme un ver, dur comme du bois. Le méritait-il vraiment ?
Il gagna la chambre dans laquelle il avait dormi jusqu’à cette nuit. Lourdement, il s’assit sur son lit et prit sa tête à deux mains. Sa jambe droite exécutait de petits rebonds répétitifs sur la pointe du pied. Il fit pression sur ses tempes avec ses avants-bras, les mains croisées à l’arrière de son crâne, et grogna, contrôlant le volume de sa voix. Il soupira en se relâchant, les yeux mouillés.
Il s’empara de son speedo et de sa trousse de toilette. Gagnant le rez-de-chaussée d’un pas léger, il passa rapidement à la douche avant de plonger dans la piscine pour nager.
Soan, réveillé par l’absence de Meike à ses côtés, se leva à son tour.
Dévalant les marches de l’escalier dans un simple caleçon, il eut juste le temps de voir son ami sauter dans le bassin. Il sourit : Meike entretenait quotidiennement son corps et ça le rendait vraiment appétissant.
Le photographe s’installa dans la cuisine avec une tasse de café face à son site web et commença à gérer ses commandes, plongeant dans les remerciements aux clients. Si au départ, il captait le bruit des éclaboussures que Meike provoquait dans l’eau, il se concentra progressivement sur son travail, si bien qu’il n’y prêta plus attention.
Aussi, l’arrivée de Meike dans son dos le surprit. Ses mains puis ses bras trempés l’enlacèrent. Bientôt, sa bouche dévala son cou avec tendresse. Il se colla au dos de Soan qu’il étreignit fort.
“Bonjour, Monsieur Hō !” dit-il affectueusement tandis qu’une main de Soan vint dans ses cheveux. “Vas-tu bosser encore longtemps ?”
Soan cliqua sur le bouton “envoyer” puis ferma son ordinateur.
“Non, c’est terminé pour aujourd’hui.”
La bouche de Meike, alors, mordilla son cou, glissa vers sa joue puis vers sa bouche. Semblant désarticuler les cervicales de Soan qu’il obligea à pencher la tête en arrière, il prit sa bouche pour un baiser souriant.
“J’ai faim…” put dire Soan dont la bouche fut remplie de la langue de son ami, aussitôt prononcés ces mots.
“Ferme-la !” opposa de la même manière Meike avant de passer ses bras sous les aisselles de Soan pour le tirer en arrière, l’entraînant avec lui dans une opération périlleuse consistant à le dégager du tabouret sans provoquer sa chute. De bonne grâce, Soan se laissa emporter par la bourrasque Meike.
Le mannequin s’écroula dans le canapé, attirant Soan qui s’adossa à lui, au-dessus de lui. Les mains de Meike allaient et venaient par derrière sur son abdomen, tentaient l’approche déraisonnable des cuisses et de l’aine de son compagnon dont il mangeait littéralement les lobes d’oreille et la nuque.
Ils furent si enthousiastes qu’il perdirent l’équilibre et se vautrèrent sur le carrelage, éclatant de rire.
“Putain, c’est froid !” brailla Meike.
Soan saisit ses poignets, les plaqua au sol et fixa son ami dans les yeux :
“Meike, j’ai vraiment très faim !”
Le jeune Allemand prit le fessier de Soan à pleines mains et le pressa contre lui, savourant la raideur de son sexe contre le sien.
“Toute la vitamine et les protéines dont j’ai besoin sont là…”, dit-il.
Il sentit les doigts de Soan manipuler son speedo puis le regarda droit dans les yeux quand il se hissa sur lui. Son pénis toqua à la porte de sa petite lune. Meike pinça les lèvres et respira fort par le nez. Un coup de rein et Soan le pénétra, lui arrachant un profond râle. Furtivement, il nota l’absence de préservatif, appréciant nettement la différence dans le contact intime. Il pressa les lèvres sur la poitrine de Soan qui accéléra la cadence, brutalisant amoureusement ses entrailles, comme en témoignait le claquement de leurs peaux lorsqu’elles se heurtaient. Le bassin de Meike accompagnait les voyages de Soan dans sa lune. Il exhalait de plus en plus bruyamment. Quand il sentit tout à coup le corps de Soan se cabrer, il noua puissamment ses bras autour de lui et cria tout autant que Soan dont le sperme jaillit au fond de lui avec véhémence.
Un sourire anima le visage de Meike à mesure qu’il se relâchait, accueillant tout contre lui son partenaire assouvi. Un énorme frisson le traversa, provoquant un rire chez Soan.
Ce dernier se redressa, se retira du corps de son ami dont il caressa les cuisses pendant un moment tout en l’observant. Puis, il se pencha vers lui, bisa ses abdos avant de se relever.
“J’ai faim !”
“Moi aussi !”
Meike empoigna volontiers la main tendue de Soan pour se hisser à son tour sur ses pieds.
Alors qu’il suivait son ami pour préparer le repas en sa compagnie, un signal sonore l’informa d’un appel entrant sur son téléphone portable. Le prénom sur l’écran, “Jürgen”, le fit réagir aussitôt. Il s’empara du smartphone et sortit sur la terrasse pour répondre.
Soan, qui s’affairait à la préparation d’un bon petit-déjeuner, ne pipait absolument rien à la conversation en allemand. Néanmoins, il avait perçu de la bonne humeur en début de discussion puis celle-ci devint plus tendue. Enfin, il n’y eut plus un mot.
Soan, préoccupé, se posta sur le seuil de la baie vitrée du salon.
“Meike ?”
Son ami se tenait debout, le regard absorbé par le vide, faisant tournoyer son smartphone au creux de sa main.
“Ach Scheiβe !”, lança Meike d’une voix puissante.
“Meike ?”
“Je dois te parler…”, dit Meike, après réflexion.
“Je t’écoute.”
“J’ai depuis hier des choses importantes à te dire. Je ne le dis pas parce que j’ai peur que tu me jettes. Pourtant, je n’ai pas le choix. On ne peut pas continuer ensemble sans que tu sois au courant. Je sais que je vais te perdre.”
“Peut-être pourrais-tu me faire confiance…”
Meike se tourna vers Soan.
“J’ai confiance en toi…”
“Visiblement pas assez.”
Meike ferma les yeux, soupira avant de s’asseoir sur une chaise longue. Soan fit de même, se trouvant ainsi assis face à lui.
“Mon père n’a jamais accepté que je sois gay”, commença Meike. “Mais quand je lui ai révélé que je voulais faire une carrière de mannequin, il a décidé de me retirer de son testament. Il m’a viré de la maison. J’ai obtenu de lui le droit d’occuper notre villa de vacances le temps pour moi de trouver une solution d’hébergement. Il m’a coupé les vivres : je ne sais même pas comment je pourrai continuer à financer mes études. J’ai dû lui remettre les clés de la villa quand j’ai pris mon vol pour te rejoindre.”
“Tu me dis que tu n’as plus d’endroit où habiter ?”
“Un copain de Hambourg devait m’héberger provisoirement mais il vient de me dire que ce n’était plus possible. Donc pour le moment, je n’ai pas de solution de rechange.”
“On est ensemble, maintenant… Je peux t’accueillir à la maison.”
“On ne se connaît que depuis deux semaines !”
“Tu as raison : c’est trop rapide. Mais dis-moi quelle est la norme : un mois, deux mois, six mois, un an…? Combien de temps faut-il pour considérer qu’on tient à l’autre ?”
“Tu m’accueillerais chez toi ?”
“Suis-je supposé te laisser dormir dans la rue ?”
“Mais c’est impossible que je vive en France car l’université est à Hambourg.”
“Je suis certain que tu trouverais une équivalence en France pour la filière que tu suis.”
Meike se leva et, tournant le dos à son ami, marcha sans but véritable, semblant tourner en rond. Soan allait l’interpeller quand il reprit :
“Ce n’est pas le plus lourd.”
Soan croisa les mains, prenant une respiration.
“Tu commences à me faire peur…”
“Au printemps, une agence d’escort a repéré mon profil. Ils m’ont déjà envoyé sur deux missions”, dit-il, cherchant ensuite ses mots. “J’ai gagné, pour six jours de travail, plus que si j’avais bossé en usine pendant un mois. En plus, les deux clients m’ont fait des cadeaux. Vendre la montre que l’un d’eux m’a offerte, m’a rapporté plus qu’un mois de salaire. L’agence est contente de mon boulot et veut que je signe un contrat.”
“Escort…: ça implique le sexe, n’est-ce pas ?”
“Oui. Si je signe ce contrat, je serai l’escort d’un type riche, célèbre ou puissant pendant trois jours chaque mois. J’ai besoin de ce pognon pour financer mes études et me loger. Maintenant, je n’ai plus le choix. Mais ça implique que je vais te perdre.”
Les traits de son visage se tordant, Meike ferma les yeux.
Soan marcha énergiquement vers lui, prenant ses paumes dans les siennes pour les caresser.
“Pourquoi me perdrais-tu ?”
“Parce que tu ne peux pas accepter que je sois la putain d’un autre type même trois jours par mois.”
“Admettons que tu signes ce contrat : même pendant le mois le plus court de l’année, je reste bénéficiaire net de ton petit cul.”
Meike rit mais aussitôt s’affaissa vers Soan, posant son crâne sur son épaule. Le ventre et la gorge serrés, il eut du mal à poursuivre. Il se redressa et sonda le regard de Soan.
“Tu ne vas pas me jeter ?”
“Non. Par contre, j’aimerais que tu me fasses deux ou trois promesses…”
“Lesquelles ?”
“Tout d’abord, tu ne dois jamais accepter que quelqu’un te fasse du mal.”
“L’agence crible les profils sexuels des clients et des escorts. Je ne vais pas choisir un client qui me ferait du mal.”
“Quoi qu’il en soit, Meike : promets-le!”
“Promis !”
“Ensuite, si jamais un jour tu n’as plus envie d’y aller, promets-moi de ne pas continuer sous le prétexte de l’argent !”
“Promis !”
“J’en ai une troisième : promets-moi que tu vas être rigoureux sur le suivi médical !”
“Oui… C’est prévu dans le contrat…”
Soan hocha de la tête, approuvant cela.
“Au sujet du contrat : tant que nous sommes en vacances, ne le signe pas !”
“Soan, je vais avoir besoin de cet argent…”
“Meike, promets-moi : ne le signe pas avant la fin des vacances.”
Meike chercha des réponses dans le regard de Soan mais n’en trouva aucune.
“Okay ! Je te le promets. Mais tu vas vraiment me garder comme petit-ami ?”
Soan déploya ses bras autour des épaules de Meike, l’étreignant bien fort. Il entendit un sanglot contenu, un merci écorché et un soupir dans son cou.
“J’étais certain que j’allais te perdre…”
“Je suis en train de tordre le cou de tous mes principes pour toi… Alors fais-moi confiance !”
(à suivre)